la griffe du chien 🐶 wouf

Le partisan

Je suis un chien et, contrairement à Tobby, je ne suis partisan d’aucune équipe. Comment pourrais-je appartenir à un groupe, moi qui ne suis même pas fidèle à mes propres opinions? Une cage densément peuplée ; voilà à quoi je compare tous ces rassemblements causés par la partisanerie. Je me méfie d’ailleurs de cet être trop cohérent nommé « partisan », que cache-t-il derrière son masque?

Être partisan, c’est suspendre son jugement au profit de l’homogénéité d’un groupe. Le politicien le sait bien, lui qui se sculpte régulièrement à l’image de son parti. Comme à la cour de récréation, il rejoint un rassemblement qui l’interpelle émotivement, puis se conforme aux valeurs de ce groupe pour mieux s’y inclure. Ce ne sont pas ses idéaux qui causent sa partisanerie, mais sa partisanerie qui lui dicte qui être. Voilà pourquoi tous les partisans sont si semblables.

En s’identifiant à un groupe, l’individu se sent solidifié et cohérent. Dans ce pacte, il suspend son caractère unique pour revêtir une identité préconstruite qui lui permet de ne plus penser à ce qu’il est vraiment. Sa vie devient plus facile et prévisible.

J’en connais une qui collectionne d’ailleurs ces déguisements identitaires. Sans prévenir, elle devient partisane de tout et de rien, prétendant que chaque nouvelle identité provient d’elle-même. Cette quête de quête est ironique, car en croyant être à sa propre recherche, elle s’éloigne de ce qu’elle est vraiment : rien du tout.

Il n’est pas facile d’aborder la vie sans se donner un sens à soi-même. Avez-vous déjà remarqué cette curieuse ambiguïté qui survient lorsque vous ne faites strictement rien? C’est l’Étrange-Problème-Sans-Nom, un inconfort viscéral qui alimente, entre autres, la prospérité des équipes sportives. Je vous l’annonce, la partisanerie prend racine dans la peur de ne rien être.

Rares sont ceux qui résistent à la tentation de se transformer en ce qu’ils touchent. J’admire celle qui joue du violon sans devenir violoniste, car j’y vois force, générosité et sagesse. Il faut être fort pour ne pas chercher à se remonter grâce à un titre ; généreux pour ne pas s’accrocher aux fruits de son action ; et sage pour ne pas se solidifier. C’est là une vraie créatrice, qui détourne le regard de son art fraîchement produit, pour ne pas s’y attacher.

Il est possible d’exister sans étiquette. Essayez-le, et vous vous heurterez sans doute à ceux pour qui être, c’est se définir. Comme quand le sage abandonne ses biens pour se simplifier l’existence, le civil n’y verra que régression.

Dites-moi de quoi vous êtes partisan, et je vous y pointerai votre faiblesse. Laissez tomber ce réflexe d’être quelqu’un : vivez dans l’absence d’identité et trouvez-y votre liberté. Faites de cette ambiguïté votre échelle pour vous surmonter vous-même!



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