la griffe du chien 🐶 wouf

La solitude

Moi qui suis un chien, on m’a souvent confronté à la solitude : c’est le sort réservé à ceux qui travaillent peu. On dit qu’il vaut mieux être seul que mal accompagné, mais seulement faut-il être bon ami avec soi-même! Certains feraient mieux de ne pas trop s’isoler ; la solitude briserait leur âme fragile.

N’est-il pas curieux que l’isolement soit une des plus grandes tortures, mais aussi l’outil des sages? Certains n’y trouvent que tourments, alors que d’autres y découvrent la liberté. Pour le néophyte, la compagnie d’autrui sert souvent de bouée l’empêchant de sombrer dans son dialogue mental. Pour l’initié, la solitude est un couteau à double tranchant, et c’est justement pourquoi il l’apprécie, lui qui veut se clairsemer.

Celle qui cherche à s’épurer sera bien servie par la solitude. En limitant les bruits extérieurs, il lui sera plus facile d’observer sa véritable nature. Qu’elle soit cependant prudente, car elle y rencontrera un chien de garde au jappement inlassable appelé « Je » . Ce cabot défend farouchement son territoire et lui rendra la solitude difficile. Il veut l’empêcher d’y voir clair!

Si vous n’aimez pas la solitude, c’est que vous n’y êtes pas vraiment seul : la bête vous a pris d’assaut! En vous parlant grâce à « votre » petite voix, ce monstre entrave votre solitude et vous bande les yeux. Méfiez-vous, la discussion entre votre petite voix et vous-même est toxique. N’égarez pas votre présence, qui sert de théâtre à tout ce bruit. Vous êtes le silence qui sépare ces mots!

Le sage trouve refuge dans la solitude, car il y cesse de se parler. Parviendrez-vous à vous asseoir au pied d’un arbre jusqu’à ce qu’il ne reste que l’arbre? Voilà le secret du sage, qui profite de la solitude pour se relâcher de soi-même, comme une vague retournant à la mer.

L’isolement est un feu ardent ; celle qui le maîtrise sans s’y brûler pourra s’éclairer soi-même.



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